LA BATAILLE DU GOUFFRE GELE
[HRP] Récit d'animation lié à l'évènement inter-guildes "Le Siège du Dôme de Svanir"
La brume matinale couvrait les murailles et la fraîcheur saisissait ceux qui sortaient de leurs tentes. Le fort était calme ; le réveil des combattants se faisait péniblement et l'activité lente et engourdie du matin contrastait nettement avec l'effervescence qui prenait place ensuite tout au long de la journée pour ne s'éteindre qu'à la nuit tombée.
Peu à peu, les braises somnolentes furent réveillées par les gens de l'intendance ; pages, écuyers et serviteurs pour ceux qui en avaient et par tous ceux qui devaient se préoccuper d'eux-mêmes. Et la vie de camp s'intensifiait à mesure que le bruit achevait de lever tout le monde. Ici et là, les chefs des différentes armées, clans et tribus, compagnies et autres bandes s’acquittaient des obligations de leurs rangs en donnant leurs premiers ordres, puis, on les vit se diriger vers le donjon qu'ils empruntèrent pour accéder à la muraille ouest.
Là-haut, les étendards claquaient au vent qu'ils défiaient, perchés sur de longs mâts fièrement dressés sur des tours fortifiées qui dominent la région. Des hurlements lointains trouvèrent un écho dans les montagnes et nul ne sut si ce furent des bourrasques violentes déchirées par les crêtes qui cisaillent l'horizon ou quelque créature sanguinaire qui étendait son aura de terreur. Mais les chefs ne prêtèrent pas attention à ces rumeurs lointaines ; se trouvant déjà à parler de ce qui les réunissait tous ; la bataille à laquelle ils devaient mener leurs troupes. L'enthousiasme des uns s'opposait au flegme des autres et les mots dessinaient au fur et à mesure la tactique qui serait mise à l’œuvre. Et comme toute alliance le vit lorsqu'elle cohabite, les mésententes et les inimitiés s'invitèrent à la table des discussions.
Argyhll MacFaol, que l'usage voulait qu'on appelle « MacFaol » pour signifier son rang, écoutait en silence. Quand il fut concerné par l'une de ces hostilités qu'un clan dont il ne savait rien semblait porter aux siens, il prit sur lui de l'ignorer afin de ne pas lui donner prise. Tout au plus rappela-t-il les raisons de sa présence, faisant écho à celles exprimées par le Duc Takoda Valyena, Seigneur de la Colonie d'Ascalon. Un homme qu'il connaît pour lui avoir offert l'hospitalité et qui lui apporta dans son discours, un soutien implicite.
C'est dans le cours d'une matinée déjà avancée que les imposantes portes du Refuge du Croisement s'ouvrirent lourdement avant de laisser défiler le cortège impressionnant des trois « bannières ». La première se trouvait dirigée par Araghast Proudmaul, dont la mission était d'engager le combat sur le Lac Gelé après que les Svanirs les y aient rejoint pour la bataille. A la tête de la deuxième, Takoda Valyena devait déborder les ennemis par le flanc afin d'enfoncer leurs lignes. Quant à la troisième, MacFaol à la tête de son clan devait profiter d'une ouverture pour pénétrer dans le « Gouffre », but ultime de la bataille, qu'il fallait assaillir et capturer. C'est ainsi que le Clan du Loup se trouva l'honneur de porter le coup fatal au cœur du camp des suivants de Jormag.
Et le Lac Gelé atteint, les bannières se mirent en ordre de bataille. Les éclaireurs Svanirs avaient déjà fait leur œuvre et les troupes ennemies étaient prêtes à livrer combat, aussi et sans attendre, Araghast mena la charge de la plus grande bannière des trois et la violence de l'impact des deux masses grouillantes, hérissées de fer résonna dans la vallée. Les premières gerbes de sang qui constellèrent de pourpre le miroir immaculé de glace jaillirent ci et là, accompagnées par les hurlements de fureur et les gémissements morbides des gorges ouvertes aux vents assoiffés. Les lieutenants qui hurlaient les ordres peinaient à se faire entendre dans le brouhaha assourdissants des armes et armures qui s'entrechoquaient, des cliquetis permanents et percussions violentes, des tirs de fusils et des sifflements caractéristiques des flèches qui fusaient en tout sens. De longues minutes s’égrainèrent à mesure desquelles, les combattants, engagés dans une chorégraphie chaotique, dansaient déjà sur un lit de sang parsemé de corps inanimés et des membres sauvagement amputés.
Profitant que cette mêlée furieuse se livre aux sacrifices sordides que les dieux de la guerre exigent en tribu, le Seigneur Takoda Valyena dirigea dans une manœuvre tactique parfaitement exécutée, sa bannière au contact. Le débordement frappa au flanc la masse compacte des Fils de Svanirs qui fut durement enfoncée. Et alors que les combattants de la Maison Valyena et tous ceux qui se trouvaient sous les ordres du Duc se mêlaient à la bataille, Argyhll MacFaol, Rí du Clan du Loup, saisit, sans attendre et sans l'ombre d'une hésitation, l'opportunité qui s'offrait à lui. Rasant avec les siens, les pieds de la falaise qui longeait leur flanc gauche, laissant sur sa droite, le bouillonnement des combats en cours, il fondit droit sur l'entrée du Gouffre.
Au hurlement de « [i]MacFaol !!![/i] » repris en autant d'échos ardents par chacun des siens, il donna la charge pour investir le camp ennemi. Surpris, les ennemis cédèrent d'abord à la panique et nulle pitié ne leur fut accordée. Les lames des guerriers et des gardiens secondaient les flèches des archers en une seconde vague emportant tout sur son passage, tel un raz de marée qui noyait les infortunés dans leur propre sang. Lorsque les chefs et les Chamans Svanirs prirent la mesure de ce qui se passait, la résistance s'organisa et la contre-attaque fut brutale. Aux ordres de MacFaol, une ligne de front fut formée, barricade vivante de boucliers et d'armes de toute sorte qui accueillaient chaque ennemi qui s'en approchait, de coups violents et meurtriers. L'ennemi lui aussi avait de l'ardeur au combat et sa rage habituelle ne fut pas absente ce jour là ; aussi ne fallut-il offrir aucune faiblesse de son corps, ni faille dans la ligne, que ceux-ci n'auraient pas tardé à exploiter. Les coups pleuvaient mais les rangs tinrent bon et les ordres du Rí du Clan du Loup fusaient à mesure qu'ils progressaient dans le Gouffre. Des géants de givres furent envoyés contre eux qui frappaient avec une violence inouïe, projetant les guerriers comme des fétus de paille. Et les victimes ne devaient la vie qu'à la qualité de leurs armures et de rester conscient, à leur condition physique. Lentement, les Svanirs cédaient du terrain jusqu'à apercevoir le cœur de leur campement où un totem immense à l'effigie de Jormag se dressait, autour duquel des chamans incantaient, pris d'une transe endiablée.
Et lorsqu'un portail magique naquit près du totem, grandissant au rythme des psalmodies, chacun sut l'urgence qu'il y avait à vaincre au plus vite pour faire cesser le sombre rituel à l’œuvre. Dès lors, on redoubla d'ardeur et puisant toutes leurs ressources physiques, exaltés par une détermination sans faille, les combattants du Clan MacFaol semèrent la mort dans les rangs ennemis. Les tirs ciblés des archers abattaient, un à un, les chamans, faisant cesser l'incantation rituelle... en vain. Tous morts, l'invocation semblait se poursuivre sans que rien ne fut à l’œuvre et il était bien difficile d'en trouver la source, alors même que de nouveaux géants de givre se dressaient contre eux avec leur férocité redoutable. C'était sans compter l'apparition terrifiante d'une gueule draconique dans l’œil éthéré du portail magique aux formes ondulantes. Son souffle surprit la ligne de front qui manqua d'être balayée par sa puissance et le froid glaçant qu'il produisait. Et ce fut de justesse que l'on sépara en deux la troupe, l'une dirigée par MacFaol, l'autre par son frère Ingvald, tandis que les archers continuaient de harceler de leurs flèches tout ce qui fut soupçonné d'être à l'origine de cette magie.
Et c'est à Saoirse NicFaol, sœur du Rí et Arngrimm MacFaol, guerrier émérite du clan qui sauva MacFaol au cours de ce combat, que l'on dut de réussir à mettre un terme à ce qui aurait probablement provoqué la défaite de toute l'armée engagée dans cette bataille. Leur instinct les mena à penser que le totem en était la source et quand Arngrimm fit connaître son avis, Saoirse ordonna aux archers de tirer avec elle sur un pic de glace opportunément placé sur les hauteurs. Ce dernier céda après avoir résisté jusqu'à faire douter les tireurs de leur réussite et il s'abattit lourdement sur un géant de glace qui s'effondra sur le totem : le brisant sur le coup. Des distorsions étirèrent étrangement le portail en tout sens puis celui-ci implosa soudainement avant d'exploser avec violence, détruisant le dernier géant de givre et projetant avec lui d'innombrables fragments de glaces en projectiles acérés et perforants. Plusieurs combattants furent touchés de plein fouet et s'écroulèrent, qui un pic glacé dans la jambe, qui de multiples éclats dans les chairs aux endroits libres de toute protection, qui assommé après avoir été projeté.
Il fallut de longues minutes pour se remettre de l'explosion et sans attendre, les ordres furent donnés de venir en aide aux blessés. D'autres de vérifier chaque corps ennemi afin d'achever tous ceux qui n'étaient pas morts et de fouiller les recoins du campement pour s'assurer qu'aucun n'en réchapperait. Et ce furent comme autant de spectres envoyés par la Mort elle-même que les combattants arpentèrent les lieux où venaient de se dérouler la terrible bataille, transperçant et égorgeant les corps inanimés, massacrant ceux qui s'étaient cachés.
Ce fut faute de temps que le Clan ne put sacrifier à sa coutume guerrière qui invitait à trancher les têtes des ennemis et à les ficher sur des piques sur les lieux de la bataille pour désigner les vaincus et les produire en exemple macabre afin de donner à réfléchir aux autres ennemis. Mais ce ne serait que chose reportée, puisque au soir l'occasion leur serait de nouveau donné de le faire.
Aussi, les blessés rassemblés de sorte à leur apporter les premiers soins, MacFaol convint d'aller au plus vite, prêter main forte aux deux autres bannières toujours engagées dans un combat sanglant. Mais, à peine les portes du Gouffre franchies, le clan aperçut au loin, les bûchers d'alerte du Refuge du Croisement. Malgré la fatigue, malgré les blessures de ceux qui pouvaient encore se mouvoir, ce fut au pas de course que les combattants prirent le chemin du retour.
Arrivant en vue des remparts, MacFaol constata le siège que subissait la place forte. La porte nord souffrait les assauts des Fils de Svanirs qui escaladaient les murailles à l'aide d'échelles, repoussés avec vigueur par le contingent resté en défense. Trois balistes positionnées en amont des positions ennemies, tiraient sans relâche sur les défenseurs ; littéralement arrachés du chemin de ronde, par les traits imposants et mortels. Le Rí donna l'ordre de gravir le flanc de montagne qui s'étendait vers le nord afin de prendre l'ennemi à revers ; ce qui fut fait dans une charge sans concession ou chacun sacrifia à nouveau son corps à la douleur pour ne dominer que deux choses ; la peur et la situation. Les servants des balistes furent emportés dans la mort par les flèches des archers menés par Saoirse, tandis que les guerriers et gardiens enfonçaient les lignes arrières. Puis, tenant position afin de les garder en tenaille, ce fut un carnage que subirent les serviteurs de Jormag...
Mais quand le calme revient et que la fin des combats semble sonner, c'est pour mieux briser l'espoir des combattants. Des hurlements sur les remparts appelant au renfort de la muraille ouest, MacFaol laissa derrière lui les balistes qu'ils avaient entrepris de faire tracter à l'intérieur du fort comme prise de guerre, bien utile à l'alliance. Les marches des escaliers, gravies quatre à quatre comme un torrent rebroussant chemin, tous furent rapidement sur les hauteurs pour aider à repousser les assaillants et déjà, ceux-ci fuyaient devant le nombre qui se dressait maintenant en position dominante. Alors, pour enfoncer un peu plus la défaite dans le cœur des Svanirs, MacFaol entraîna les siens à sa suite, pour emprunter la porte sud et longer les murs par l'extérieur afin de poursuivre les ennemis, à l'image de la « bannière » sous les ordres d'Araghast.
Au pied des murailles, un calme étrange régnait comme si l'ennemi s'était volatilisé dans les bois, laissant derrière lui des vainqueurs sur leur faim. C'était sans compter sur la ruse des Svanirs, car alors que les « bannières » s'avançaient pour aller vérifier les sous-bois et prendre les balistes désertées par leurs servants, des dizaines de combattants ennemis sortirent de leurs caches sous la neige et de derrière les arbres et autres obstacles naturels. Une pluie de flèches fondit sur les hommes au pied des murailles qui manqua de peu de faire un sévère carnage. Ingvald MacFaol fut l'une des victimes de ce stratagème et accusa le coup d'une flèche fichée dans son épaule.
Ne cédant pas à la panique, le Clan obéit sans hésiter à MacFaol qui ordonna de dresser les boucliers et de former un rang serrés et aux archers de tirer en une réplique sifflante et meurtrière. Puis, ils prirent le choc de la charge Svanir venue s'empaler sur leurs armes. L'ennemi en fut lui-même surpris et avant qu'il ne le réalisa, tous ceux qui étaient venus au contact gisaient au sol ; morts. Au loin, les archers et chamans ennemis, dissimulés dans les sous-bois préparaient une violente vague de mort qui ne tarda pas à fuser en la direction des deux bannières distantes chacun de plusieurs dizaines de mètres.
La présence d'esprit des gardiens et d'Abiageal, bardesse du clan, ainsi que le courage inébranlable de la ligne de front bardée des boucliers des guerriers, permit d'éviter, là-encore, le pire. Mais il s'en fallut de peu pour que cela se réalisa pour la « bannière » dirigée par Araghast qui endura difficilement cette foudroyante frappe à distance.
L'ouverture était évidente et MacFaol donna, aux siens, l'ordre de tirer en direction des sous-bois. Alors qu'il s'apprêtait à donner la charge pour s'attaquer aux unités de tireurs et de mages ennemis dont on devinait le repli aux allures de fuite paniquée, le Rí aperçut la mauvaise position dans laquelle se trouvait ses alliés. Renonçant à son projet, il mena les siens en direction des sous-bois et vers l'ennemi. Grâce à la magie, Abiageal les rendit invisible aux yeux des Svanirs le temps nécessaire à s'approcher suffisamment et s'ensuivit un massacre d'une rare violence. L'apparition inattendue des combattants du Clan du Loup au milieu d'eux, eut raison de la détermination des sbires de Jormag qui perdirent tous leurs moyens, écrasés et fendus par les coups furieux des guerriers et des gardiens, transpercés de toute part des flèches des archers, lacérés et déchirés par les griffes et les crocs des chiens de guerre, panthères et autres compagnons animaux du Clan.
Une éclatante victoire avait été obtenue ce jour, que célébrait déjà le Clan en clamant des « MacFaol !!! » hurlés à qui mieux mieux pour espoir que les fuyards les entendraient et sachent qui avait participé à leur cinglante défaite. Car oui, le Clan du Loup avait relevé le défi qui lui avait été fait, prouvant toute sa valeur et son efficacité au combat, honorant ses amitiés et sa parole.
Lorsqu'on fut assuré qu'aucun ennemi vivait encore dans les parages, MacFaol donna l'ordre de faire emmener dans le fort, les trois balistes qui se trouvaient sur le versant ouest et de vérifier que fut fait la même chose pour celles qu'ils avaient dû laisser derrière eux à la porte nord. Puis, il rentra avec les siens. Là, les blessés reçurent les soins de leurs druides, tandis que les autres rangeaient leur équipement et profitait du havre de paix pour se laver du sang qui avait recouvert leur peau ; manteau écarlate, éphémère et sinistre de la victoire.
Autour du feu de leur campement, MacFaol dans l'intimité de son clan, leur dit sa fierté et son contentement. Chacun avait contribué à couvrir de gloire et d'honneurs le « tartan » de leur clan, emblème de leur identité, source de toute leur fierté, raison de chacun de leur sacrifice, héritage sacré de leurs ancêtres, legs futurs et sans prix à leurs descendants ; relique éternelle et sacrée qu'ils nourrissaient de leurs exploits non pas pour eux-mêmes, mais bien pour alimenter la mémoire vivante du Clan.
Car les hommes meurent... mais le clan demeure.
[i]« Mac Faol ! »[/i]
Argyhll MacFaol [GM Le Clan du Loup]
Rik du Clan du Loup.